Fouad Boussouf, directeur du Phare, Centre chorégraphique national du Havre Normandie

« La danse comme un art du partage. »

Portrait
Publié le 19 novembre 2025

Fouad Boussouf, directeur du Phare, Centre chorégraphique national du Havre Normandie, vient d'ouvrir une nouvelle édition de Plein Phare, le grand rendez-vous annuel de la danse au Havre. L’occasion d’un échange autour de son parcours, de son regard sur la création et de cette édition 2025 qui s’annonce foisonnante.

  • Bientôt quatre ans à la tête du Phare. Quel bilan tirez-vous ? 

Ces années ont été à la fois intenses et passionnantes. Quand j’ai pris la direction du Phare, je découvrais un territoire, ses publics, ses équipes, et j’apprenais à incarner ce double rôle d’artiste et de directeur. Aujourd’hui, le lieu est solidement ancré, il porte une identité reconnaissable : un esprit d’ouverture, de dialogue et de mouvement. C’est ce rythme, cette couleur et cette âme que nous donnons au Phare pour qu’il soit à la fois repère et tremplin.

  • Quels sont les prochains défis ? 

Nous sommes bien installés, mais rien n’est jamais figé. Mon métier, c’est le mouvement. Après avoir consolidé notre implantation locale, nous voulons désormais développer une présence internationale : des projets voient le jour au Royaume-Uni, au Cambodge ou encore au Rwanda. Cette ouverture au monde nourrira notre lien avec le territoire havrais et renforcera la visibilité du Phare à l’échelle nationale.

  • Plein Phare est le grand rendez-vous de l’année. Que souhaitez-vous partager avec cette nouvelle édition ?

Plein Phare est un festival-manifeste, un instantané de la danse actuelle. Il mêle styles, origines et esthétiques pour exprimer la vitalité de cet art. On y croise des artistes reconnus et des jeunes talents, des créations venues d’ailleurs et des propositions locales. Le tout s’inscrit dans un esprit participatif : ateliers, rencontres et spectacles invitent le public à devenir acteur autant que spectateur. Cette année, douze spectacles irriguent la ville et la Normandie, du Volcan au MuMa, du Théâtre de l’Hôtel de Ville à Juliobona. Parmi les temps forts, je citerais In Comune d’Ambra Senatore, exploration sur des musiques somptueuses ; Matière(s) première(s) d’Anne Nguyen, hommage virtuose aux danses africaines urbaines ; Memento de Laura Defretin et Brandon Masele, duo électrisant de hip-hop et d’électro ; ou encore Happy Manif de David Rolland, balade chorégraphique participative à l’Université du Havre. Ces propositions traduisent la diversité des corps, des récits et des émotions qui animent la danse contemporaine.

  • C’est aussi l’occasion de présenter Oüm, votre création… 

Oui, Oüm est une pièce qui me tient particulièrement à coeur. Créée en 2020, elle n’avait pas pu vivre pleinement en raison de la pandémie. Elle rend hommage à Oum Kalthoum, immense voix du monde arabe et figure féministe avant l’heure. En y intégrant des poèmes du perse Omar Khayyam, j’ai voulu faire dialoguer la danse contemporaine et orientale, la guitare électrique et l’oud, le corps et la voix. C’est un spectacle d’une grande intensité émotionnelle.

  • Vous veillez à toucher de nouveaux publics ? 

Absolument. La culture doit rester ouverte à tous. Nous faisons en sorte que chacun puisse franchir la porte du Phare, notamment grâce à une politique tarifaire accessible et à des actions participatives : ateliers, sorties de résidence, projets amateurs comme le Ballet Éphémère ou le Cercle de femmes, qui valorisent la pratique de la danse par tous et toutes. Ces moments de partage donnent un autre sens à la création : celle du lien social.

  • Vous aimez aussi croiser les disciplines. Vous préparez une création autour de la littérature ? 

Oui, dans le cadre du festival littéraire Le Goût des Autres, qui se tiendra du 15 au 18 janvier 2026, nous allons créer un spectacle inspiré du conte indien Les Oiseaux électriques de Pothakudi. Ce sera une forme hybride mêlant danse, marionnettes et ombres projetées, destinée au jeune public. Là encore, c’est une manière d’élargir notre horizon, d’aller vers de nouveaux spectateurs et prouver que la danse peut tout raconter, même les histoires venues d’ailleurs.

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Plein Phare

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