« Je suis toujours là, car j’ai toujours cette flamme. »
Publié le 10 juillet 2025
Après 50 ans de carrière, Little Bob, le rocker havrais qui a su conquérir le monde, est toujours là et prêt à enflammer la scène. À l’occasion de cette année anniversaire, il revient sur son passé, son présent, mais aussi sur ses projets.
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Vous célébrez vos 50 ans de carrière. Aviez-vous envisagé une telle longévité ?
Il est évident que non. En réalité, j’ai commencé en 1963 avec mes premiers groupes, en amateur, Les Apaches, Little Bob and the Red Devils et Le Blues Gun. Au départ, c’était surtout une histoire de copains, j’ai toujours eu cette envie de faire du rock, mais il a fallu apprendre à jouer. Quand j’ai commencé, à l’âge de dix-huit ans, je paraissais en faire douze, mais j’en voulais, c’était ce qui m’animait et c’est ce qui m’a permis de toujours mener ma barque. Ensuite, à partir de 1975, il y a eu mon premier groupe professionnel, Little Bob Story, avec lequel nous avons joué jusqu’en 1988. Nous venons d’ailleurs de retrouver les bandes de notre dernier concert à La Cigale à Paris et nous allons prochainement sortir un album live. Toute cette aventure a parfois été difficile : c’est un monde qui peut être dur, mais j’ai toujours réussi à entraîner les bonnes personnes à mes côtés. Entre 1976 et 1980, nous avons fait plus de 350 concerts en Grande-Bretagne, mais au début, on ne gagnait pas un centime et ce n’était pas ça qui primait. L’important, c’était que nous avions envie de le faire et, aujourd’hui, je suis toujours là. J’ai toujours cette flamme et, de toute façon, je ne sais faire que ça : chanter. Au total, j’ai sorti 18 albums studio et cinq live, donc ça en valait la peine.
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Gardez-vous des souvenirs marquants de toutes ces années passées sur scène ?
Des souvenirs, nous en avons par centaines. Je me souviens qu’en 1976, pour la sortie de mon premier album, High Time, nous jouions en Angleterre et notre son était tellement dur et mélodique à la fois que les membres de The Clash, des Sex Pistols et de The Damned étaient venus nous voir sur scène. Un soir, après un concert, Glen Matlock, le bassiste originel des Sex Pistols, est entré dans la loge pour me demander s’il pouvait jouer avec moi, mais comme j’avais déjà un super bassiste, j’ai gentiment refusé sa proposition. Je me souviens aussi d’un concert à la Roundhouse, qui est une salle de 2 500 places dans le nord de Londres, lors de notre deuxième tournée en 1977. On jouait en première partie de The Stranglers et de Motörhead – d’ailleurs, un de leurs fans m’a piqué mon blouson ce soir-là. Le matériel de tous les groupes était installé sur scène, si bien que pour nous, il ne restait que quelques centimètres pour jouer. J’avais les bouts des bottes qui dépassaient dans le vide. Nous avions une telle rage qu’après le concert, Lemmy, le chanteur de Motörhead est venu me voir pour me dire qu’on l’avait bluffé. C’est comme ça que nous sommes devenus amis tous les deux.
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Pour cet anniversaire, vous serez sur la scène du festival Nuits Suspendues le 18 juillet. Vous avez invité d’autres légendes du rock havrais. Comment s’est organisé ce concert ?
Nous avons pensé cette soirée comme une véritable création et nous avons voulu nous entourer de trois groupes havrais mythiques : City Kids, François Premiers et The Scamps. Ces groupes sont tous composés de musiciens havrais talentueux, qui ont du métier et qui font partie, depuis très longtemps, du paysage rock de notre ville. Nous nous connaissons tous très bien et nous nous sommes souvent croisés sur la route lors de nos tournées respectives, mais c’est la première fois que nous allons jouer officiellement, tous ensemble, sur un plateau commun au Havre. L’idée était aussi de valoriser ces formations qui ont également traversé les années et qui sont toujours présentes aujourd’hui. Pour ce concert spécial, nous leur avons lancé un petit défi, mais je ne veux pas en dire plus pour le moment, nous préférons réserver la surprise pour le public.
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Après avoir foulé les planches durant un demi-siècle, prenez-vous toujours le même plaisir à chanter devant votre public ?
J’ai toujours énormément de plaisir à monter sur scène, mais cette sensation a évolué avec le temps. Malgré les années, je ne sens pas mon âge, mais quand je suis sur scène, je dois bien admettre que les choses changent. Je ne peux plus chanter comme quand j’avais 35 ans, mais je trouve que je chante presque mieux qu’avant. Le fait de ne plus pouvoir pousser ma voix comme dans le temps m’a permis d’explorer de nouvelles façons d’interpréter ma musique, même si les vieux fans préfèrent sans doute celle d’avant. Et à vrai dire, je m’en moque un peu. Je ne ressens plus les choses de la même manière, mais je continue à prendre du plaisir en concert.
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Ce portrait a été initialement publié dans le magazine LH Océanes
LH Océanes n°250
Édition Juillet - Août 2025